Projet de loi de finances 2023 : des mesures inopérantes sur le coût de la vie ( Dr KAKDEU)
- Admin
- 23 nov. 2022
- 3 min de lecture

Le projet de loi des finances 2023, si elle est votée en l’état, contient des incohérences susceptibles d’annuler les incitations prévues pour lutter contre la vie chère en 2023.
Une des incohérences majeures est que le même gouvernement augmente le coût de l’acquisition de la propriété foncière (chapitre troisième).
Question : comment va-t-on augmenter la productivité locale lorsqu’il est plus difficile d’obtenir la propriété foncière ? Il n’y aura point d’investissement massif dans l’agriculture sans sécurisation du foncier. Aussi, il n’aura point d’investissement massif au niveau local sans accès au capital. Le gouvernement doit défiscaliser l’obtention du titre de propriété pour augmenter le nombre de bénéficiaires susceptibles d’intégrer le système financier (banque et assurance agricole).
Par ailleurs, le gouvernement camerounais limite l’exonération de la TVA sur les achats des denrées alimentaires chez les producteurs aux seules entités publiques (article 128) : Why ? Ce serait une mesure fantaisiste et discriminatoire si l’on ne l’élargissait pas à l’ensemble des acheteurs, notamment les privés (hôtels, restaurants, etc.). En temps normal, l’objectif du gouvernement devrait être d’augmenter la marge des producteurs actuellement sous la menace des intermédiaires et de réduire les prix sur le marché actuellement pris en otage par les spéculateurs. Pour ce faire, la loi devrait être dépouillée de toute forme de discrimination sur le marché susceptible même de tomber sous le coup de la concurrence déloyale.
Pire, la loi des finances 2023, si votée en l’état, favorisera l’augmentation du secteur informel. C’est une carence de politique budgétaire. Selon l’INS, le Cameroun disposait de 2,5 millions d’Unité de Production Informelle en 2011. Ce nombre a dû doubler en 2022. Pourquoi ? Parce que chaque année, le gouvernement camerounais pousse les contribuables à migrer vers l’informel afin d’échapper à la pression fiscale. En effet, la politique d’augmentation de l’assiette fiscale du gouvernement actuel est verticale là où il faut appliquer une politique horizontale. Cela signifie que le gouvernement surcharge le peu de contribuables qui restent dans le formel (chapitre troisième) au lieu de favoriser le retour de l’essentiel des contribuables qui sont réfugiés dans l’informel (près de 90%). Le gouvernement camerounais va donc soumettre aux députés un budget qui fournit « les ressources et charges de l’État » (article deuxième) sans politique réelle de création de richesse.
Une nième incohérence est de prévoir l’augmentation des prix du carburant (essence, gasoil, gaz) à travers l’institution d’une taxe spéciale (article 229). Cette action malheureuse engendrera l’augmentation du coût de production et du transport et donc, l’augmentation des prix de vente sur le marché. C’est une très mauvaise nouvelle pour le consommateur qui achètera à coup sûr plus cher en 2023.
En conclusion, nous voyons que les mesures prévues dans le projet de loi en circulation sont inopérantes et seront sans impact sur la coût de vie en 2023. Il y a manque de cohérence et surtout d’une ingénierie financière susceptible de permettre que les incitations prévues engendrent les effets escomptés. Il est à préciser que ce brouillon en circulation reste très incomplet et pernicieux dans la mesure où le gouvernement a tenu à remplacer toutes les pilules difficiles à avaler par des tirets ou des points interrompus courts. Cela montre le mépris avec lequel le gouvernement traite la Représentation nationale devant qui il est supposé être responsable.
Disons que c’est la patate qui avait accepté d’être mangée crue. Les députés et autres sénateurs n’ont qu’à se faire respecter.
Louis-Marie Kakdeu,
Membre du Shadow Cabinet SDF
Économie, Finances et Commerce
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